Cyrille (le futur Starets Serge) est né le 3 août 1903 (21 juillet
suivant le nouveau calendrier) à La Haye (Pays-Bas) où son grand-père
maternel, Cyrille Struve, exerçait les fonctions d’ambassadeur de Russie
et où ses parents, Georges et Marie Chévitch étaient alors en visite.
Ceux-ci retournèrent en Russie alors qu’il était âgé de trois semaines.
Son père était officier supérieur dans
l’armée russe. Il était issu d’une famille noble de la République de
Venise qui possédait un fief en Herzégovine. Il disposait d’un important
personnel de maison et avait pris soin d’engager des employés français,
allemand et anglais, afin que ses enfants puissent apprendre à
pratiquer les trois langues.
C’est ainsi que Cyrille parlait déjà
parfaitement le français à l’âge de huit ans. Il resta toujours
reconnaissant à sa nourrice française, Parascève, de lui avoir non
seulement enseigné la langue et la culture d’un pays qu’il aimait, mais
aussi d’avoir fortement contribué à sa première formation religieuse.
Cyrille était un garçon éveillé, courageux, bon et généreux.
Son père ayant été nommé, en 1914,
général des Hussards de la Garde impériale et « membre de la suite de Sa
Majesté », Cyrille vint habiter avec sa famille à Tsarskoïe Selo où se
trouvait le palais du Tsar. Âgé de onze ans, Cyrille se vit attribuer,
comme c’était la coutume pour les fils de dignitaires, le grade
(honorifique) d’officier et reçut une petite formation militaire.
Lorsque survint la Révolution en 1917, la
famille Chévitch se vit confisquer tous ses biens. Elle se réfugia,
comme de nombreuses familles nobles de Petrograd, à Kislovodsk, où elle
avait déjà fait de nombreux séjours. Cyrille s’engagea, en 1918, aux
côtés de jeunes de son âge dans le groupe de l’Union panrusse de la
jeunesse monarchiste fondée par le comte Michel Grabbe, ainsi que ses
proches amis dans les décennies suivantes Alexandre Kasem-Beg et le
prince Vladimir Romanov. Son père combattit dans l’Armée Blanche, mais
en octobre 1920, la famille fut contrainte, comme beaucoup d’autres, de
prendre le chemin de l’exil hors de la Russie, via Odessa et
Constantinople.
Après un court séjour en Suisse (où
Cyrille eut cependant le temps de passer un examen du niveau du
baccalauréat), elle habita deux ans à Berlin. Dans la capitale
allemande, Cyrille trouva un emploi dans une banque ; l’un de ses amis
était Paul B. Anderson, futur dirigeant du Mouvement international de la
jeunesse chrétienne (YMCA). Passionné de musique classique, il lui
arriva, en cette période d’inflation galopante, de dépenser
l’intégralité de son salaire hebdomadaire pour acheter une place de
concert.
En 1923, la famille Chévitch vint
s’installer à Paris, dans un immeuble situé dans le XVIe arrondissement.
Cyrille retrouva aussitôt du travail à la banque Morgan dont le siège
était place Vendôme ; il y était spécialement chargé de la tenue des
comptes courants des têtes couronnées, princes et grands-ducs. Il
habitait chez ses parents dont la maison était fréquentée par de grandes
figures — intellectuelles, artistiques et politiques — de l’émigration
russe.
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